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Kosmotopies  / Présentation de la globalité du cycle

photographies numériques  - La Teste de Buch - décembre 2021

(Port de la Teste, port du Rocher, prés salins est et ouest, coulée verte, plage du Pyla)

   Le paysage photographié est territoire d’enfance en dépit des transformations opérées. Rien ne laisse présager à voire ces prises de vue au cadrage drastique la proximité de la route et des véhicules, les immeubles au loin bordant les pourtours du bassin d’Arcachon, les hordes de promeneurs…  

Sans doute suis-je hantée par ce que recèlent ces lieux en substance : sécrétions tramées au secret d’un flux, vie souterraine et limoneuse par delà l’immédiateté de ce  qui se donne à voir.

Plus que voir, je perçois aux prismes d’une mémoire que la conscience d’un temps révolu altère ; c’est ici dire l’imaginaire d’un paysage étrangement familier où s’entrelacent de multiples temporalités - un dépôt ou voile à surface, une latence.

Ce tremblement du visible se conjoint à l’altération de chaque photographie  dont le traitement numérique relève du même protocole : translation du format rectangulaire de la prise de vue en format carré et renversement de l’image. Cela contribue à écraser la définition, troubler l’étagement des plans, laissant advenir des zones fantômes quand bien même infimes, et dont le maillage supposé  laisse poindre  interstices, espacements œuvrés, un brouillage dans la texture photographique, comme repliée, tout au moins densifiée.

Il s’agit de voir autrement, de défocaliser en bouleversant l’habitus du regard en son orientation convenue, pour a contrario  privilégier détails topographiques et portions de paysage au détriment d’une approche panoramique.

Cette fiction photographique s’ouvre à d’autres respirations que la poétique de renversement comme les montages séquentiels des 9 photographies intensifient, impulsant dès lors un autre récit,  disant  de cette portion de monde  un outre monde, substantiel, originel, pré-existant à ce que l’homme empreint, dépouille et imprègne  - scories, pollution, prédation économique …

Mes kosmotopies sont kosmotropisme  (tropos, tournement) :  déambulant, je scrute ces lieux en résonance avec ce que meuvent les forces du ciel – attraction lunaire, flux et reflux des marées, rivages sensoriels.

Attentives aux détails, - peau du monde comme substrat organique et mouvant -   mes prises de vues, bien que stases figées, instaurent pourtant, à l’aune du montage, rimes chromatiques, lignes et éclats de lumière, pans et textures.

L’ensemble semble presque abstrait, picturalisé en dépit de  la matérialité de ce qui se donne à voir : algues, goémons, fientes d’oiseaux - mouettes, goélands, hérons cendrés -, cristallisations salines, humeurs et liqueurs de sables, vases et striures, coquilles de crustacés , rochers mousseux,  oxydations et salives océanes, feuilles, herbes et plantes -  salicornes, obiones, soudes maritimes, sarcocornes, etc.

Je témoigne, le temps de ce rêve photo-topo-graphique d’une reconnexion à l’essentiel.

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