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    22 mars 2020  /  PRESENCE ici-bas  / furtivité des songes / des cieux cueillir la déhiscence ...

Haïkus photographiques / Présentation de la globalité du cycle

photographies numériques et mots-mondes 

Nœuds : touts et non-touts, rassemblés séparés, consonants dissonants ;

de toutes choses l’un et de l’un toutes choses

Héraclite, fragment 10 (1)

 

   Le premier confinement (17 mars – 11 mai 2020) initie ce cycle de haïkus photographiques dont la  cohérence, outre le fait de conjoindre images et mots-monde, réside en cette caractéristique quasi protocolaire : témoigner d’une déambulation dans un territoire restreint, très proche du lieu où je vis (quartier des Amidonniers, Toulouse)

   En dépit de l’exiguïté de ce territoire se déploie une liberté d’errance paradoxale : marchant et photographiant, je me réapproprie une temporalité  où me reconnecter au flux du vivant, sa pérennité (panta rhei), attentive à la respiration du monde comme à ce que dessille et révèle le passage des lumières et des saisons. Limites et frontières ne cessent de trembler ; elles se brouillent, élargies à l’aune d’une climatologie immersive et nourricière.

   Je prends le temps de voir, autrement, libre d’instaurer dans la patience  et l’ouvert d’un regard,  cette fiction  assourçante, qui est aussi ma façon de résister à l’effondrement d ‘un monde épuisé, à l’emprise de la ville, à ce qui nous désolidarise de la sève du vivant : ancrage (ou ne jamais plus oublier la gravité de l’incarnation).      

   C’est également nourrir un dialogue avec le ciel : poétique de renversement, jeux de reflets dans les eaux pour dire l’en-haut et ses mouvances célestes ; prégnance du cosmos, relativité du temps et des distances, relativité de l’espace. Notre planète, héliocentrée, est grain de sable dans l’infini ; de plus amples flux la meuvent.

   Les briques du vivant viennent de loin ; nos corps ont « l’âge de l’univers » (2). En toute chose de ce monde, un alphabet cosmique  (ou particules élémentaires), dit cette origine commune.

  Sidération ou ne plus tout ressentir à l’aune étroite de notre anthropocentrisme.
  Ces haïkus photographiques,  focalisés sur l’infime, tentent de célébrer ce mystère sacré de la vie ou ce que je nomme, pauvrement, la beauté du monde.

 
 

NOTES :

(1)  Héraclite, Fragments, (traduction de Marcel Conche), Paris, P.U.F., coll. « Épiméthée », 1998, p. 433
(2) « Les quarks, les particules élémentaires de la nature qui composent la matière, sont apparus il y a 13,78 milliards d’années. »  in Aurélien Barrau, Trous noirs et espace-temps, Bayard, les petites conférences, Paris, 2018, p.34

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